Décès du notable Michel Lekounga: l’hommage poignant d’un fils de Lébamba

Libreville ; (GM) — La disparition il y a quelques jours à Libreville de Michel Lekounga-La-Massala, acteur incontournable de la naissance du département de la Louetsi-Wano, laisse inconsolables les populations de cette partie du pays, car ainsi plongées dans un immense chagrin et une grande stupéfaction. Dans ce contexte de deuil, les hommages se multiplient à l’égard de cette figure tutélaire louvanoise, parmi lesquels celui que nous a transmis, sous la forme d’une oraison saisissante, l’un de ses frères cadets qui a tenu à garder l’anonymat. Ci-dessous la communication

Ah Mon Cher aîné, Ah Yaye, Ah Ivonda, C’est Vrai Ça ?

Quelle immense douleur que celle de te savoir parti de ce monde auquel tu as tant donné. Quel déchirement atroce que celui de me rendre compte que je ne te verrai plus jamais à ta terrasse si accueillante de Lébamba, où tu ne tarissais jamais de conseils, d’anecdotes et d’une sagesse dont tu avais seul le secret pour tes hôtes qui n’en ressortaient jamais comme ils étaient venus.

Ah Mon Cher aîné, Ah Mukulu, est-ce donc vrai que tu es parti ?

Tu es donc parti retrouver nos ancêtres et tes parents qui te mirent au monde à Lébamba-Village un certain 16 février du début du siècle précédent.

De ta dense biographie marquée par ton attachement à l’éducation et aux valeurs chrétiennes catholiques, moi et d’autres retenons de toi que tu étais l’homme de tous les défis qui ont jalonné la longue marche de Lébamba vers la modernité.

Personnalité au destin singulier, tu accèdes au monde tumultueux de la politique par ton élection comme député du Bloc Démocratique Gabonais de Léon Mba le 12 février 1961, presque simultanément avec ta charge de Conseiller des Collectivités locales pour le compte de Lébamba.

La riche carrière parlementaire qui fût la tienne montre à suffisance tes capacités extraordinaires d’adaptation à cet univers difficile. Réélu sous la même bannière en 1964, tu t’affirmas avec grand mérite par la suite en comptant parmi les députés du nouveau Parti Démocratique Gabonais jusqu’au 12 février 1973.

Tu n’étais pas de ces députés dont on dit qu’ils ne servent que de décor ou de caisse enregistreuse. Tes fonctions de Rapporteur exigeant de Commission parlementaire, tu les assumas avec un tel brio que ton entrée dans l’administration territoriale, suivie de tous les postes de commandement que tu occupas avec rigueur et sens de l’État, en fût logiquement la conséquence consécratrice qui ne connut son épilogue qu’en mai 1992 lorsque tu fis valoir tes droits à la retraite.

Ah Michel Lekounga, Ah Ngoua Mutu, qui peut se permettre de t’oublier ? Qui peut même l’oser ?

Aussi bien au plan national que local, tu étais un homme de conviction tel qu’il paraît peu aisé d’en trouver aujourd’hui. Fervent soutien de Léon Mba, alors que tu étais député du BDG, tu allas jusqu’à affronter momentanément les affres de l’incarcération suite à ton arrestation, aux côtés de bon nombre de tes collègues, par les militaires fomenteurs du coup d’État de 1964.

Lébamba perdit son qualificatif de « village » grâce à toi lorsque tu signas l’acte de naissance du département de La Louetsi-Wano, alors que tu assumais dignement et avec rigueur, de 1974 à 1976, tes fonctions de Sous-préfet du Poste de Contrôle Administratif de Lébamba; pour ensuite devenir le premier préfet de cette nouvelle circonscription territoriale que nous connaissons aujourd’hui.

Homme de rigueur et de vision, tu le fus vraiment en ta qualité de sous-préfet. La contestation ouverte pour une Lebamba libérée du joug des autres localités, dont tu fus le porte-flambeau très actif et admiré par le Président Omar Bongo, aura assurément été un facteur majeur et déterminant de l’accession de notre localité à sa dignité, grand motif de fierté pour les générations louvanoises actuelles et futures.

Grand admirateur du Général de Gaulle, tu n’hésitas pas à le démontrer en incitant en 1977 l’un de tes cadets actuellement ministre de la Transition à épouser la carrière des armes afin qu’in fine, grâce à tes liens particuliers avec Omar Bongo, il soit promu comme Aides de camp du président de la République, l’un des plus emblématiques de son long règne.

À Lébamba, dont la configuration actuelle est d’abord ton œuvre, et où tu accueillais tout le monde sans distinction aucune en ta demeure, tu laisses tout un peuple en pleurs face aux innombrables souvenirs partagés avec lui. Toujours ouvert au débat contradictoire, d’une intelligence vive jusqu’à ton dernier souffle, tu laisses derrière toi un vide abyssal auprès de l’élite politique, intellectuelle et administrative locale. Féru par ailleurs de football, grand admirateur de Michel Platini, n’est-ce pas toi que nous appelions affectueusement « La Plata », non seulement pour cette passion que tu avais du ballon rond, mais surtout en raison de la virtuosité de ton sens de l’analyse et de l’anticipation des événements aussi bien politiques, familiaux que culturels ?

Papa Michel, il y a tant à dire à ton sujet. Tant d’éloges mérités à t’adresser. Mais profonde et pénible est la douleur causée par ton départ. Lébamba est là, triste et en plein désarroi. Qu’allons-nous devenir sans toi, sans le livre de sagesse que tu étais, sans tes sourires, tes anecdotes captivantes et ton humour qui enseignait davantage qu’il ne faisait rire ?

Va en paix Papa. Veille sur nous là-bas, continue de nous guider depuis là-bas… Jusqu’au jour déjà rêvé par tous de nos retrouvailles parmi nos aïeux.

Merci pour tout. Merci d’avoir été ce que tu as été et Merci au ciel de t’accueillir avec les honneurs dignes de l’existence exemplaire que tu as vécu parmi les hommes.

E.M.

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