Environnement : face à la destruction des mangroves, l’extrême urgence d’agir

Libreville, (GM) — Comme l’illustre l’actualité brûlante à Libreville, le Gabon, reconnu pour sa biodiversité exceptionnelle et ses forêts denses, voit aujourd’hui un de ses trésors écologiques les plus discrets, mais essentiels menacé : les mangroves.

Ces forêts amphibies, situées en zones côtières, sont confrontées à une pression croissante liée à l’urbanisation, à la pollution, à la pêche illégale, et à l’exploitation anarchique du littoral. Leur destruction progressive, presque à l’abri des regards, alarme les experts environnementaux, les ONG et les communautés riveraines.

Qu’est-ce qu’une mangrove et pourquoi est-elle si précieuse ?

Les mangroves sont des écosystèmes de transition entre la terre et la mer. Composées d’arbres aux racines aériennes, elles s’épanouissent dans les zones côtières tropicales, à la rencontre de l’eau douce et salée. Au Gabon, on les retrouve notamment autour de l’Estuaire de Libreville et dans les provinces côtières comme l’Ogooué-Maritime ou le Komo-Mondah.

Ces zones humides jouent un rôle écologique majeur :

– Elles protègent les côtes contre l’érosion et les tempêtes marines ;

– Elles abritent une biodiversité unique, servant de nurserie pour de nombreuses espèces de poissons, crustacés et oiseaux ;

– Elles capturent le carbone en quantités bien supérieures aux forêts classiques, agissant comme des puits naturels dans la lutte contre le changement climatique ;

– Elles soutiennent les activités économiques traditionnelles, notamment la pêche artisanale.

Un écosystème en péril

Malgré leur importance, les mangroves gabonaises sont victimes de destructions massives. L’extension urbaine à Libreville, les remblaiements sauvages, les installations industrielles non réglementées et les déversements d’eaux usées non traitées menacent leur survie.

Selon des données du ministère de l’Environnement, plus de 20 % des mangroves situées autour de l’estuaire ont été endommagées au cours des deux dernières décennies. Les images satellites confirment une tendance inquiétante de régression rapide, souvent au profit de projets de développement non durables.

Des conséquences lourdes pour l’environnement et les populations

La destruction des mangroves n’est pas sans conséquences. Elle expose davantage les zones côtières à l’inondation et à l’érosion marine, entraîne une perte de ressources halieutiques (affectant directement la sécurité alimentaire des communautés de pêcheurs), et affaiblit la résilience du pays au changement climatique, en réduisant sa capacité naturelle à stocker le CO₂.

Certaines localités, comme le Cap Esterias ou Owendo, en subissent déjà les effets : littoral qui recule, maisons inondées, diminution des prises de poissons, salinisation des sols agricoles.

Des initiatives de protection en gestation, mais insuffisantes

Le Gabon s’est pourtant engagé sur la scène internationale comme un champion de la protection de l’environnement, notamment à travers son adhésion à l’Accord de Paris et ses politiques de gestion durable des forêts.

En cohérence avec ces engagements, des initiatives locales existent :

– Création de zones protégées intégrant les mangroves (parcs nationaux, réserves communautaires) ;

– Campagnes de reboisement participatif avec des ONG et des écoles ;

– Sensibilisation des jeunes à travers des programmes éducatifs sur l’environnement.

Malgré ces efforts importants, le manque de coordination, de financement et de contrôle freine les résultats. Les réglementations, bien que présentes, sont souvent contournées ou appliquées de manière inégale.

Un appel à l’action

Face à l’urgence, plusieurs acteurs appellent à une riposte nationale structurée. Celle-ci passe notamment par le renforcement des lois de protection environnementale, avec application rigoureuse ; l’intégration des mangroves dans la planification urbaine et côtière ; l’appui aux communautés locales, premières victimes de la dégradation, pour qu’elles deviennent les gardiennes actives de ces zones ; la valorisation de l’économie bleue durable, où la conservation devient une source d’emploi et de revenus.

Un patrimoine vivant à sauvegarder

Les mangroves ne sont pas des marécages insignifiants. Elles sont la première ligne de défense contre la crise climatique et la dégradation côtière, un patrimoine naturel et culturel que le Gabon ne peut se permettre de perdre. Les préserver, c’est protéger à la fois la nature, l’économie locale, la sécurité environnementale et l’identité nationale.

Carine

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