Libreville, (GM) — Le 30 mai dernier, par le truchement d’une session du Conseil des ministres, le gouvernement gabonais a décidé de mettre fin à l’exportation du manganèse brut dès le 1er janvier 2029. Ce choix, fait dans le cadre d’une stratégie globale de transformation locale de nos matières premières, qui vise à stimuler le développement industriel national, suscite déjà un vif débat.
Dans ce contexte, Christel Bories, PDG du groupe français Eramet, dont la Comilog est la plus importante filiale, a récemment exprimé ce qui s’apparente à des réserves. Lors d’une interview sur une chaîne de télévision étrangère, elle a en effet fait montre d’une certaine réticence quant à cette option. En clair, ces critiques à peine voilées s’appuient sur la faible capacité énergétique nationale et les lourds investissements nécessaires à une transformation locale du manganèse véritablement rentable. Des défis qui, sans qu’elle ne l’ait dit, lui paraissent vraisemblablement impossibles à relever par le Gabon durant la periode transitoire fixée.
La réaction ferme du STRIMM
Cette sortie de Christel Bories a provoqué la vive réaction, ce 20 juin 2025, du Syndicat des travailleurs des industries minières et métallurgiques (STRIMM). En effet, dans une déclaration pour le moins virulente en guise de droit de réponse à la « patronne » du 1er producteur mondial du manganèse à haute teneur, cette organisation syndicale dénonce vivement la posture adoptée par cette dernière.
Selon cette adresse au vitriol, signée de Jocelyn Lebama, son secrétaire général, le STRIMM accuse la dirigeante française de « condescendance » vis-à-vis du Gabon, tout en lui réaffirmant que le pays reste souverain et que c’est au nom de cette souveraineté que l’interdiction annoncée a été actée. Poursuivant dans leur élan réprobateur, ces travailleurs ont tout simplement appelé la PDG Bories à faire un choix clair entre les intérêts spécifiques du groupe qu’elle préside et ceux du Gabon dans sa volonté de bénéficier davantage des richesses de son sous-sol.
Pour le gouvernement gabonais, cette interdiction vise concrètement à maximiser la valeur ajoutée nationale issue de l’exploitation et de la transformation domestique de ce minerai, ainsi qu’à encourager l’émergence d’une industrie locale dans le secteur.
Dans tous les cas, il ne fait nul doute que cette controverse n’est qu’à ses débuts, au regard des intérêts considérables en jeu. Wait and see.
Paul Nkori